Anders, le chemin du Nord

Désireuse de remonter vers la source d’une mémoire enfouie, Stéphanie Nelson a décidé un été de partir pour la Norvège, sur les traces d’un grand-père immigré en France dont elle avait beaucoup entendu parler sans l’avoir connu. Cédant ainsi à une aimantation intime, elle a suivi le « chemin du Nord » que désigne l’étymologie du nom de ce royaume scandinave. Les photographies qu’elle a rapportées de son périple donnent à voir, non des témoignages des paysages traversés, mais des sensations brutes dont elles restituent l’expérience. Aucune image ici n’est appuyée, démonstrative, comme si l’œil n’avait cherché qu’à effleurer ce qu’il voyait, traduisant ce toucher du regard en autant d’impressions nues, adoucies par la tonalité de la lumière boréale. Au retour, ce trajet se sera révélé avoir été surtout une quête de soi : en chaque image Stéphanie Nelson peut en effet retrouver un écho symbolique de tout ce qu’elle a vécu dans son enfance. La dernière strophe d’un poème du grand écrivain norvégien Tarjei Veesas intitulé Le Voyage éclaire peut-être sur le sens secret de ce chemin parcouru vers le Nord : « Au loin palpitait un cœur indomptable en constant travail. Nous écoutions sans comprendre. Nous étions arrivés plus loin que loin. »
Jean-Pierre Chambon